NewYork USA, article invité – Il faut quitter l’humidité de notre cave. On a pris l’appartement le moins cher de Brooklyn, et objectivement on est bien tombé. Bien sûr, c’est petit-sombre-humide, et j’ai vu des musaraignes se faufiler sur le sol. Mais ces trois semaines à New York nous coûte une bouchée de donut et on savoure notre chance insolente de se sentir minuscules dans ce monde de gratte-ciels.
New-York : entre l’envie des grattes ciels de Manhattan et l’appel de Coney Island
On se chamaille sur le chemin. Ma soeur s’ennuie à Coney Island et préférerait que l’on aille arpenter le bitume de Manhattan. “Il n’y a rien à faire dans ce quartier. C’est mort. Et personne ne parle anglais en plus”. On fait une trêve et on se sépare pour la journée: je retournerai toute seule dans cet étrange quartier, figé dans le temps, et elle ira s’amuser dans le centre de New York.
Coney Island et Brighton Beach, la frontière sud de Brooklyn. Je ne sais pas ce que je cherche. J’y suis déjà passée. J’y ai vu les attractions désuètes ou vintage de la fête foraine, fermée pendant la hors-saison. Profitant de l’été indien, j’ai bien sûr testé le comptoir emblématique qui débite des hot-dogs à la chaîne et organise un concours annuel pour les boulimiques de fast-food. Un hot-dog pour le test, un hamburger au homard pour le goût, je me suis baladée sur la plage, désertée depuis la fin de l’été.
Coney Island, hors saison, c’est sans doute mort, même si nostalgique est plutôt le mot qui me vient aux lèvres. Contrairement à l’énergie et au besoin de renouveau constant qui caractérise d’autres quartiers de New York, Brighton Beach brasse encore des silhouettes chargées de petites et grandes histoires de l’URSS. Epargnée par les transformations urbaines ou commerciales, Brighton Beach semble encore un quartier d’habitations, de HLM, de vieux hangars industriels. Elle délie l’imagination de réalisateurs et j’y retrouve les scènes de mes films fétiches au détour d’un bâtiment abandonné.
Moi et New-York
Je sais ce que je suis venue observer à New York. Je veux comprendre la cohabitation de cette multitude de communautés ethniques. Dans cette ville d’immigration par excellence, plus d’un habitant sur trois est né en dehors des Etats-Unis! A Little Odessa, neuf habitants sur dix parlent russe chez eux: Ukrainiens, Russes, Ouzbèkes, Lituaniens, ils sont slaves et américains, juifs ou orthodoxes.
Descendants des Juifs d’Europe de l’Est fuyant le nazisme dans les années ’40, ou nouvelle vague d’immigrants née du démantèlement de l’URSS, ce bout de terre situé à une heure de métro de Manhattan détient la plus grande concentration de populations russophones des Etats-Unis.
Enclave surréaliste, poétique, surtout dans cette mi-saison qui donne le champ libre aux vieux pêcheurs qui écoutent les informations russes d’un poste radio essouflé…
Le lien entre ce kaléidoscope d’influences? Le russe. Brighton Beach est avant tout une communauté linguistique, un port rassurant pour celui qui se lance dans sa nouvelle vie américaine. On s’y fait des contacts dans sa langue, on y mange comme à la maison, le rêve américain va peut-être germer ici.
Dans ce Little Odessa, c’est le passé de New York qui se déroule devant nos yeux, sa tradition portuaire, ses vagues d’immigrants venus tenter le diable aux Etats-Unis. Au coeur de Manhattan, on oublie que New York est une presqu’île. La mer qui a été vitale pour New York, on ne la touche pas, on ne la sent pas là-bas, les autoroutes qui longent les rives de Manhattan en empêchant l’accès.
Revenir à Coney Island me fait ouvrir les yeux et me rappelle mon enfance passée dans les pays de l’est. Ici, les écriteaux sont parfois traduits en anglais ou dans un anglais phonétique. J’y cherche des personnages que j’aurais pu croiser à Budapest ou à Prague, des dames élégantes en fourrure, des hommes timides qui parlent fort, des étalages de paprika qui sèchent sur la rue.
Brighton Beach a-t-elle vraiment le même climat que les côtes de la Mer Noire? Ou est-ce la nostalgie des Slaves qui leur fait dresser des ponts imaginaires entre les pièces de leur histoire chaotique?
Dans l’assiette, je me perds dans les mélanges culinaires des républiques de l’ex-URSS: recettes juives, ukrainiennes, biélorusses, arméniennes, et même des inspirations orientales avec des baklavas turques qui gravitent parmi tous ces plats en cyrilliques.
Je commande une assiette de plov, un riz à l’agneau et au cumin façon ouzbèke, un borsht grand classique indéboulonable et parfumé, des raviolis à la pomme de terre qui aspirent toute la sauce du plat et laissent des gouttes grasses sur la nappe. A la télévision défilent des bimbos qui mélangent russe et américain. Elles, ce sont les Russian Dolls, un show de télé-réalité tourné dans le quartier, mais qui n’est pas vraiment destiné aux Russes du coin. “Trop cliché, trop américain”, me dit un vieux monsieur, une canne à pêche sous le bras.
Enclave surréaliste, poétique, surtout dans cette mi-saison qui donne le champ libre aux vieux pêcheurs qui écoutent les informations russes d’un poste radio essouflé, aux groupes de jeunes mères qui poussent des pelettées de bambins sur la promenade en bois. Il y a des sifflements pleins de voyelles dans cette langue que je ne comprends pas.
Un New-York slave: quelques adresses
– Pour découvrir Little Odessa: s’engouffrer même dans les boutiques dont on ne voit rien de l’extérieur.– Préparer un panier-repas au M&I International Food. Dès l’entrée, les parfums me ramènent à mon enfance passée dans les pays de l’est. On me fait goûter un jus d’abricot épais, boisson que je n’avais plus bu depuis dix ans. On peut fouiner longuement dans cette épicerie et s’étonner de la variété des pains russes, des charcuteries, et jeter son dévolu sur les Pirozhki- chaussons farcis à la viande, au chou et aux oignons, étoffer son panier de beignets aux cerises, des strudels aux pommes. A l’étage, on trouve des chocolats emballés dans des papiers brillants. En sortant, ne pas oublier de dire “Spasiba”, un paquet de molasse de raisin ou une bouteille vodka au poivre sous le bras.* 249 Brighton Beach Avenue
– Juste pour la magie de l’instant: aller dans la boutique Margis Plaza pour se perdre dans les manteaux en fourrure et les chapkas duveteuses.* 225 Brighton Beach Avenue
– S’arrêter sur les terrasses du Volna, restaurant situé sur le bord de la plage. Sur ses nappes jaunes et bleues, on dépose des plateaux de vodka dès le petit-déjeûner…* 3145 Brighton 4th Street
– Je conseille vraiment de passer quelques heures au Tenement Museum, un des musées les plus marquants que j’ai pu visiter. Situé dans le Lower East Side, ce musée propose plusieurs visites guidées à travers les appartements des immigrants juifs, russes, allemands ou irlandais, venus tenter leur chance aux Etats-Unis. La plongée dans la vie quotidienne de ces migrants est saisissante.* 103 Orchard Street
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New York a cette richesse de quartiers, de cultures et d’ambiances. C’est une ville où l’on peut aller des dizaines de fois sans jamais voir la même chose. J’adore Brooklyn, mais je ne connais pas encore Coney Island, Brighton Beach et Little Odessa. Il faut que j’y aille la prochaine fois. Après la lecture de cet article, je partirais maintenant…
NYC la ville que je rêve de visiter… mais j’ai un peu peur de me faire un torticolis ^^.
Non mais sans blague ça doit être tellement impressionnant tous ces building ! C’est un peu cliché mais personne ne dira le contraire !
Shame on me… je ne connais pas NYC!
Mais un jour bientôt… et ce jour là, je saurai à qui demander des conseils 😀
Une face presque sombre de New York , c’est bizarre comment ils vivent en communauté , ce qui m’a frappé le plus dans l’article, c’est que les gens ne parlent pas l’anglais , donc pour l’intégration je vous le dit pas
C’est vrai que la vision anglo-saxonne pour la politique d’intégration. Parfois elle a ses dérives et ses inconvénients.
Mais au moins si tu demandes à un immigré ou un enfant d’immigré ce qu’il “est”, il y a de grandes chances pour qu’il réponde “citoyen américain”.
En France, avec la prétendue volonté d’assimilation “on est tous Français peu importe vos origines”, même si sur le papier en effet c’est beau. Malheureusement dans la vraie vie c’est pas vraiment ça, vu que la discrimination à l’embauche, aux logements, à la culture, à certains loisirs… en gros tout ce qui semble fondamental. Cette forme tacite d’exclusion amène encore les des petits fils d’immigré à se demander finalement ce qu’ils sont alors qu’il ne devrait y avoir aucun doute.
Là bas tout ça n’existe pas quasiment pas. Pas de discrimination pour avoir un logement, un crédit ou certains postes…
Mais c’est vrai que la dérive est de se retrouver qu’entre communauté et parfois il y a pu avoir et qu’il y a toujours plus ou moins des tensions entre les différentes communautés de NYC.
Mais bon faut aussi comprendre que la plupart des quartiers de NYC sont complètement métissés. Les gens se mélangent sans aucun problème (bien qu’il serait naïf de penser qu’il n’y en a pas).
Perso ce qui a de beau à NYC c’est que beaucoup de personnes ont adopté la double culture. Il laisse transparaître leur culture dans la rue.
J’ai par exemple rencontré un mauritanien aussi fier de ses racines que d’être new yorkais, qui parlait anglais, français, arabe et espagnol.
Bref y’a que là bas qu’on peut voir ce genre de chose, marcher dans NYC c’est faire le tour du monde !
Et on ne parle même pas de Banksy ? : )