Entre l’homme et les bagages, nulle victoire. A la fin, il ne reste qu’une immonde flaque de sueur humanoïde respirant péniblement contre un mur.
Piotr Kroczak (dernier survivant de la bataille de Stockholm)

Attention, ce qui suit est un récit à ne pas mettre sous les yeux de tous les voyageurs. Lecture pour touristes avertis !

Le jour où Forest Gump débarqua en Suède.

La capacité pour Magda et moi-même de prévoir un horaire de départ et de ne pas arriver à s’y tenir me fascinera toujours.

Cela doit être une capacité héréditaire d’ailleurs. Une capacité transmise de génération en génération qui a forgée deux êtres totalement incompatibles avec la simple notion de “partir à l’heure”. Pourtant, on avait la volonté d’aller contre le destin. On a failli réussir. On n’est parti qu’avec seulement 35 min de retard en laissant toute notre nourriture pour la croisière voyage en bateau dans le frigo de notre couchsurfer.

 

Des pros je vous dis !

Et là, quand tu te dis dans le métro, en cherchant ta paire de saucisse polonaise entre 2 t-shirts, que que tu n’as rien à manger pour les prochaines 24h qui viennent à part du vieux pain noir rassie, tu te sens l’âme du gars dans Into the wild.

Évidemment, au bord de la berge, ce fut le délire totale avec les autres touristes. J’étais une star.

Vous voyez forest gump ?
Le moment ou il cour comme un dératé pour inscrire l’essai ?

Bah c’était pareil pour moi, avec les bagages en plus. Si prochainement sort une vidéo de youtube avec mon exploit, vous comprendrez alors pourquoi je prendrai de longues vacances.

 

Vous savez ce que j’aime chez les suédoises ?

Leur empathie.
Leur grande compréhension de l’âme humaine.
Leur capacité à interpréter un baragouinement inaudible et à le transformer en phrase ayant un sens.

 

Pourquoi ?

Parce que quand vous voyez arrivé une masse de vêtements dont on a l’impression que le possesseur vient de les sortir de la machine à laver. Alors que le bateau s’apprête à partir dans 5min. Que le checking est terminé depuis 10min. Avec un anglais tellement approximatif que l’hébreu à coté parait aussi limpide qu’une histoire de wini l’ourson…

et que vous,vous acceptez, avec votre regard d’un bleu au fond insondable, vos cheveux dont la blondeur ferait de l’ombre à boucle d’or, vos boutons d’acnés fleurissant sur le visage comme les pâquerettes au printemps… de répondre et d’aider cet individu dont on ne sait s’il pleure ou s’il su des paupières… alors la, vous transcendez l’âme humaine.
En d’autres termes, vous êtes une sainte.

 

Extrait :

“Bi%6* (respiration saccade), c&*cj in , cause, &6te” (billet, enregistrement, parce que en retard)
“We have closed the check-in 10 min ago but I will try to do my best. Can I have your Idcard please” (les enregistrements ne sont plus possibles depuis 10min, mais je vais faire de mon mieux. Puis-je avoir votre carte d’identité ?)

Le sourire qui s’illumina sur mon visage devait être le même que tout à chacun connait lors de la délivrance finale, après 3h de réunion sans pouvoir aller aux wc. Un mélange subtil entre rictus baveux et orgasme surpuissant

Après cela, même les escalators n’étaient plus une corvée. Aucune importance que la roue de la valise à sauter lors du passage un peu rustique d’une marche d’acier. Aucun remord lorsque tirant comme un forcené sur la pauvre victime désarmée, je lui arrachait une hurlement strident et des larmes d’étincelles sur le long tapis métallique.

 

Dans le combat entre l’homme et la valise. Seul le résultat compte.

Et il fut à la hauteur de mes espérances.

Un capitaine ébahit par tant de persévérance (et probablement abattu par le nivèlement de la clientèle) me confondant un instant avec un passager clandestin. Des personnes âgées dont le dentier a du crisser lorsque leurs narines vieillissantes ont détecté le délicat fumet qui se dégageait de ma personne (un croisement entre maillot de rugby et chaussettes sales trainant sous le canapé)… des gamins me pointant du doigt demandant “pourquoi le “monsieur il pleure” ?

Et votre copine arrivant, telle une fleure innocente et vous sortant “Tu vois, on est arrivé à l’heure, il n’y avait pas de quoi paniquer…”
A cet instant, j’ai imaginé plusieurs scénarios de torture que je laisse le loisir de deviner au lecteur attentif. C’est dans des instants comme celui-ci ou vous ne savez pas si vous devez rire, pleurer… (vomir vos poumons sur ses pieds ?) et au fond de vous-même, lorsqu’elle vous fait signe de vous presser pour rejoindre la cabine. Vous vous dites…

Si Dieu créa la femme, c’est pour tester la capacité de résistance des hommes. Puis, lassé de ses questions, il la chassa du paradis… et l’homme accompagna naturellement sa dulcinée, pour le meilleur et pour le pire… croulant, à cette époque déjà, sous les bagages…

FIN

Je vous raconterai ensuite comment j’ai tenté de dévaliser une machine à sous à bord du bateau et à quel point on se sent ridicule lorsque l’on tente de faire Leonardo Di Caprio dans Titanic, à l’arrière du bateau, avec un vent glacial par 10 C.

(ce récit fait suite à celui-ci : Voyage au pays de Millenium)