En dehors de Marrakech, lorsque l’on s’éloigne en direction de l’Atlas pour atteindre, au delà, les plateaux désertiques, une certaine excitation nous envahit si vous êtes, comme je le fus alors, encore vierge de toute rencontre avec le désert.

On part alors, de bonne heure, de la place Jamaa El Fna, encore vide de ses nombreux kiosques, où s’impatientent les touristes et s’entassent déjà les fourgonnettes qui doivent nous emmener à bon port. Ne vous étonnez pas si on vous passez d’un véhicule à l’autre, trimbalé comme l’un de ses singes ou serpents qui emplissent ce lien à l’appel des touristes,  à mesure que les petites agences et les conducteurs se décident, chacun se voit attribuer sa place. L’agressivité de bon matin ne fera de toute façon pas avancer les choses plus rapidement. De plus, comme s’en est rendu compte ce bedonnant touriste allemand -décidément- les disputes en arabe, lorsque l’on ne connait pas l’arabe, sont perdues d’avance.

Il y a une certaine nonchalance à laquelle il faut vous accoutumer.

Etant assez insouciant de nature, j’attendais donc que l’on démarre, une orange à la main.

 

L’Atlas et ses “airs de repos”

 

De loin, on pourrait croire à tort que l’on pourrait enfiler les skis pour aller faire un tour sur les pistes marocaines. Je ne sais pas si c’est possible, bien que j’ai oui dire que c’était le cas… mais cela ne devait etre ni le lieu, ni la saison à moins que la neige ait pris une couleur rouge depuis la révolution de jasmin.

Notre chauffeur s’arrêtera donc dans les aires de repos prévues à cet effet.

Entendez par la des nids à touristes ou, dans une “ferme cosmétique agricole”, on essayera de vous vendre un savon fait main à 12 euros les 100 grammes. On retrouve les mêmes en France et en Pologne, moins cher, les taxes, le transport, les intermédiaires et j’en passe. J’avoue, je ne suis pas un expert en fabrication de savon fait main mais je trouve que me prendre pour un cochon tirelire ambulant ne me rendra pas enclin à aider la population locale. Surtout lorsque vous voyez, au bout de la route qui mène au petit magasin, stationner une Porsche Cayenne.

 

Je ne chipote pas pour des centimes et je laisse filer parfois un ou deux euros avec le sourire… mais ce genre de filouterie plus haut, je ne cautionne pas. Ici, point de culture du marchandage, point de négociation. On est là pour cracher son fric. Mon portefeuille était à cours de salive et les vacances au Maroc devraient être synonymes, selon moi, d’échanges et de répit et non de filouterie !

 

L’Atlas et ses sacs en plastiques

 

Une vision qui elle, au lieu de me faire mal à mon porte monnaie me fait mal au coeur. Surtout lorsque je vois les touristes que je côtoie ne pas se gêner pour en ajouter. Comme si la marque de leur passage était de polluer le lieu qu’ils sont censés voir. On peut marcher sur les sentiers et voir des sacs virevolter à haute altitude. On sait malheureusement qu’un manque d’éducation explique aussi cet état de fait. Cela n’enlève pas grand chose au charmes de la montagne et de ses habitants forts sympathiques pour la plupart. De fait, si vous avez comme moi de la place dans votre sac à dos, vous pouvez toujours en ramasser quelques uns. C’est un goûte d’eau dans l’océan mais pour celui qui a soif de propreté, c’est mieux que rien.

 

Les roches et le sable, le sable et la roche

 

Qu’y a t-il de fascinant à regarder un océan de sable onduler sous nos yeux ?

Sans doute la beauté sauvage de l’instant.

On s’assied, le matin, ou le soir de préférence. En plein jour, le sable est trop brûlant.

On ne parle pas parce qu’il fait trop chaud et que la gorge est sèche. On se protège des bourrasques du vent.

On n’écoute pas. On se tait. On contemple.

C’est beau comme un ciel libre de pollution nocturne. Comme une mer tumultueuse. On se sent petit, insignifiant. On n’est rien. On naît en tant que grain de sable pour finir en grain de sable. C’est vivifiant ce vide qui aspire vos pensées. On se verrait bien passer quelques semaines à chevaucher ces dunes trompeuses sur le dos d’un dromadaire capricieux.

Juste pour souffrir d’un autre quotidien et se plaindre -un peu- en bon français du, je liste, froid la nuit, dromadaire récalcitrant, soleil mordant, sable irritant…

Métro, boulot, dodo devient mirage, boire, dromadaire.

Pas de pots d’échappements. On relativise. On respire l’air brûlant.

La rencontre avec le désert est presque mystique pourrait-on dire.

Cela nous donne un air lointain de Peter O’Toole dans Lawrence d’Arabie, le charisme en moins.


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